Sortir du Bois

Malgré l’alerte à la pollution, une belle journée pour sortir du Bois.

C’est la date choisie par l’un des candidats repreneur pour se présenter, faire connaissance et expliquer son projet à un cercle élargi de salariés.

Initiative stratégique mais louable : ainsi, il est malin d’acquérir l’adhésion du personnel en amont, encore plus malin de prendre la température et de rencontrer le personnel « en vrai » au-delà des managers de Direction. Une certaine politesse à souligner, ainsi que le courage d’assumer son projet en venant le présenter en personne.

Le premier tiers de la réunion a consisté en une parade de séduction : aimez nous !

Tel un mâle qui veut obtenir quelque chose, le candidat repreneur s’est paré de ses plus beaux atours et a multiplié les plus impressionnantes acrobaties.

Forcément, dans ce genre d’exercice, on peut être un peu maladroit voir ridicule : nous décrire comme « une PME en rupture avec le passé et son passif », il fallait oser la formule. Mais finalement, décrire ses réussites, dire qu’on prône la transparence, qu’on conservera l’esprit PME mais qu’on éliminera la politique ou les jeux personnels, que l’on a de grandes ambitions pour cette entreprise dans l’avenir et que l’on s’attachera à identifier les problèmes de fond et que leur résolution sera suivie par des plans d’actions nominatifs et inscrits dans des délais, cela peut être un discours séduisant.

La première étape d’approche était donc réussie.

Mais il a fallu passer au projet et là, tout de suite, c’était beaucoup moins glam.

Une diminution de Chiffre d’Affaire d’environ 25% et une nécessaire réduction des coûts fixes l’accompagnant : ça c’est l’effort de reprise demandée, le « reprofilage » de l’entreprise. Il en découlera le départ d’un tiers du personnel actuel.

A cette réalité, encore une formule casse gueule : « une entreprise plus maigre mais plus performante », même si c’est d’actualité en cette période de régime pré essayage de maillot de bain.

Après cet échauffement, au final plutôt attendu, la présentation est passée au volet équipe : les Hommes.

Et là, je pense que cela a été le plus rance : faire du neuf avec du vieux, c’est toujours compliqué. J’ai perçu la déception de l’auditoire qui peut légitimement croire que ceux qui ont échoué dans le passé ne pourront pas réussir à l’avenir. Peut être que les participants à cette réunion pensaient que ceux dont ils voyaient le nom inscrit sur le slide sensé leur évoquer la Dream Team, auraient plutôt fait partie de la centaine de salariés non repris.

Peu de questions, peu de remarques, la salle est resté silencieuse.

Je n’avais pas grand-chose à gagner mais rien à perdre donc j’ai posé une unique question destinée à animer cette phase de la réunion intitulé « Echanges ».

Quand, à cette question très altruiste : « Quel est le meilleur argument de votre projet ? », ils ont répondu : « C’est à vous de le trouver », j’ai su que le Paon du début s’était transformé en Aigle Royal.